A priori, beaucoup de choses pourraient rapprocher 20 ans à Molène, jamais molénais et La peau trouée : il s'agit en effet de deux premiers films, deux documentaires autoproduits centrés sur des (un) homme(s) perdus(s) au milieu de la mer, tous les deux sortis et remarqués durant l'été 2004. Pourtant, il y a loin entre un secrétaire de mairie bavard (20 ans à Molène, jamais molénais) et des pécheurs de requins "taiseux" (La peau trouée). Surtout, le traitement et le regard de ces deux films sont radicalement différents.
Véro Podaven, brestoise, travailleuse manuelle, a réalisé le portrait d'un homme, un vrai personnage, qui ne demandait qu'à livrer son secret alors que Julien Samani, ancien élève des Arts décoratifs de Paris, a travaillé sur les corps et les couleurs, les gestes et l'écoulement du temps, autour d'hommes dont le travail harassant se passait pour eux de commentaires. Le premier documentaire, une rencontre réussie, a connu un succès certain sur le littoral atlantique tandis que le second a légitimement récolté de nombreux prix au sein des meilleurs festivals de documentaires (avant d'être diffusé sur Arte).
Ainsi va le documentaire, divers, éclaté, où seul le désir de filmer et l'apparition des techniques légères permet parfois de dépasser de nombreuses contraintes. La multiplicité du réel est elle-même démultipliée par le choix des approches. Il vous est donc proposé deux regards qui débordent sensiblement le cadre d'un territoire (la Bretagne). La mer, belle et ambivalente, va une nouvelle fois traverser les écrans.
Tangui Perron
Filmographie :
20 ans à Molène, jamais molènais (2004) de Véro Pondaven
Art total (2002) de Pierre Pacotte Gwenn et Excoffier
La peau trouée (2004) de Julien Samani