Momo le doyen

Laurent Chevallier

2006, 85 min. France

Synopsis

Durant ces quinze dernières années, j’ai eu l’occasion de réaliser des films dans un pays du continent africain : la Guinée Conakry. Des films dont la bande originale fut confiée pour la plupart à un artiste hors norme, Momo Wandel Soumah, le doyen du jazz africain. Véritable roi du swing et de l’improvisation, Momo créait sa musique sans l’écrire, en s’inspirant des chansons populaires, et en réunissant autour de sa voix « façon Louis Armstrong qui serait sorti de sa savane » et de son vieux saxo desséché, les grands maîtres des instruments traditionnels africains : kora, balafon, flûte pastorale, djembé… Un cocktail étonnant capable de vous transporter en un instant et sans crier gare de la tradition à la modernité. Momo était né en 1926 mais il était resté pour tous un grand enfant insouciant des aspects matériels de la vie tant qu’il pouvait gagner « un petit quelque chose » pour créer sa propre musique. Dans sa jeunesse, son premier instrument fût le banjo et devant l’impossibilité de se procurer des cordes, Momo avait équipé son manche de câbles de vélo… Depuis notre première rencontre en 1992 durant la préparation de « L’Enfant noir », notre complicité n’avait fait que se renforcer. Momo était devenu à la fois un ami, un grand frère, voire un père, toujours prêt à me conseiller et à se laisser conseiller, tout le long de mon parcours africain. En dehors de mes films, je me suis occupé de lui faire enregistrer un album (Afro Swing) dont il souhaita que j’assume la direction artistique, de lui trouver un hôpital en France capable de lui réparer son fémur et de lui permettre de marcher à nouveau. L’avenir semblait enfin vouloir lui sourire. Son entrée fracassante en 1998 au sein de la troupe « Circus Baobab » (premier cirque aérien d’Afrique Noire) comme compositeur et chef musicien lui avait permis par la suite de se faire (re) découvrir. Mais Momo n’a pas eu le temps, contrairement au vieux Cubain Compay Secundo ou à la Cap Verdienne Césaria Evora, de devenir une « star » de la world music. En avait-il seulement envie, je ne le pense pas, tellement il était attaché à son pays natal. Momo refusait toute contrainte du show bizz cherchant souvent à préserver son anonymat pour conserver ainsi son sentiment de liberté… Et puis Momo s’est éteint un jour de juin 2003 à Conakry, subitement, après une dernière répétition avec son nouveau flûtiste, l’ancien venant justement de décéder… À travers mes « tonnes » d’archives personnelles tournées au fil de nos aventures, à travers un retour sur les lieux qui ont vu le passage de Momo mais aussi à travers les souvenirs à la fois attristés et enjoués de ses proches, j’ai souhaité faire un film au présent. Pour faire revivre les images de ce pionnier qui avait su dire aux Américains « Ok, le jazz est né chez vous, mais, moi je l’ai ramené chez moi, en Afrique, car c’est de là qu’a jailli sa source. » Pour raconter à la première personne l’histoire merveilleuse de ce doyen dont la vie était, du matin au soir, imprégnée de ses chants, de ses notes, comme un pied de nez donné au désespoir, à la misère environnante.

Production

Sombrero Films

Musique

Momo Wandel Soumah

Participation

CNC