Parcours de producteur·rice
Rencontres du cinéma documentaire
De 2007 à 2017, nous avons invité des producteur·rices à venir parler de leur parcours professionnel, à développer la relation qu’ils et elles ont construit avec les auteur·rices, à partager leurs préoccupations et leurs enthousiasmes. 10 producteurs et productrices de premier plan se sont succédé au fil des éditions des Rencontres du cinéma documentaire.
Leurs interventions, riches de la liberté et la générosité de leur parole offrent, une fois retranscrites, un panorama inédit et passionnant de la production du documentaire de création en France au XXIème siècle.
Qu’ils et elles en soient ici très sincèrement remercié·es.
Richard Copans – Denis Freyd – Blanche Guichou – Alexandre Cornu – Jacques Bidou – Michel David – Sophie Salbot – Céline Loiseau – Félicie Roblin – Yaël Fogiel
2007 – Richard Copans, Les Films d’ici
Le rôle du producteur, aux côtés du réalisateur, partageant son désir de films et apportant toute son énergie à un projet est mis à mal à la fois par l’auto-production et par le rapport de force avec les diffuseurs… Pourtant ce rôle est essentiel à la création. Pour le réaffirmer, nous organisons cette année, sur le modèle de la master-class de cinéaste, un parcours de producteur, et pour cette première fois, nous avons proposé à Richard Copans de venir parler de son travail de producteur
À la fois cinéaste, producteur, chef-opérateur et co-fondateur de la maison de production des Films d’lci, Richard Copans est, depuis plus de 20 ans, une figure majeure du documentaire le plus exigeant en France.
Il reviendra sur les différentes étapes qui ont marqué son parcours: le cinéma militant, la fondation des Films d’Ici, les incursions dans la fiction (Les Amants terribles de Danièle Dubroux et Stavros Kaplanidis en 1984)… et revisitera une histoire récente du documentaire dont il a été un acteur et un témoin privilégié : la création du compte de soutien à l’audiovisuel, les débuts d’Arte, jusqu’ aux évolutions récentes qui touchent le documentaire de création. En compagnie de ses invités, les cinéastes Stan Neumann et David Teboul, il évoquera ses thèmes de prédilection, ses amitiés, sa conception du travail de producteur et commentera des extraits de films qui ont marqué son itinéraire de cinéphile et de producteur.
Bio-filmographie Richard Copans
Né en 1947 à Paris, Richard Copans a étudié à l’Idhec. dans la section prises de vue.De 1969 à 1976. Il est assistant-opérateur d’Andréas Winding, de Philippe Rousselot, de Pierre Lhomme et Yann Le Masson puis opérateur-réalisateur dans le collectif de cinéma militant Cinélutte de 1973 à 1978. En 1978, il fonde avec Yves Jeanneau les Films d’lci, maison de production de films principalement documentaires.
Il a, depuis, produit près de 80 films, notamment de :
- Robert Kramer (Cités de la plaine, 2001; Route One USA, 1989)
- Luc Moullet (Le Litre de lait, fiction, 2006; Essais d’ouverture, 1988; La Comédie du travail, 1987, Genèse d’un repas, 1978)
- Richard Dindo (Genet à Chatila, 2000; Arthur Rimbaud – Une biographie, 1991)
- Claire Simon (Coûte que coûte, 1996)
- Denis Gheerbrant (Le Voyage à la mer, 2002; Grand comme le monde, 1999)
- Stan Neumann (LTI, la langue ne ment pas, 2004; Une maison à Prague, 1998)
- David Teboul (Bania, 2004)
Il a réalisé plus de 40 films dont :
- Les Disques de Rikva, 2005
- Paris-Périph, 2004
- Racines, 2003
- Les Frères des frères, 1992
Ainsi qu’une vingtaine de films de la série Architectures, seul ou en co-réalisation avec Stan Neumann.
Extrait du catalogue du Festival, édition 2007
Filmographie sélective depuis 2007 :
- Hommage à la Catalogne de Frédéric Goldbronn, 2025
- Chienne de rouge de Yamina Zoutat, 2023
- Aucun d’eux ne dit mot de Jacques lin, 2020
- Mon amour de David Teboul, 2020
- La Tour-Village de Meryem De lagarde, 2019
- Sigmund Freud, un juif sans Dieu de David Teboul, 2019
- Mallé en son exil de Denis Gheerbrant, 2017
- On a grèvé de Denis Gheerbrant, 2013
- Géographie humaine de Claire Simon, 2012
- La Terre de la folie de Luc Moullet, 2009
- La République de Denis Gheerbrant, 2009
- Marseille dans ses replis de Denis Gheerbrant, 2009
- Le Centre des Rosiers de Denis Gheerbrant, 2009
- Les Femmes de la cité Saint-Louis de Denis Gheerbrant, 2009
- L’Harmonie de Denis Gheerbrant, 2009
- Les Quais de Denis Gheerbrant, 2009
- La Totalité du monde de Denis Gheerbrant, 2009
- Les Bureaux de Dieu de Claire Simon, 2008

2008 – Denis Freyd, Archipel 33
Nous avons choisi, pour ce second rendez-vous, de recevoir Denis Freyd. Car ce producteur exigeant, dont le parcours professionnel est exemplaire, fait également preuve d’une grande lucidité dans sa réflexion sur son métier.
Fondateur et directeur des sociétés Archipel 33 et Archipel 35, il a produit de nombreux films documentaires et se consacre aujourd’hui de plus en plus intensivement à la fiction. Il fait partie du Club des 13, réuni autour de Pascale Ferran, qui a publié un rapport sur les problèmes de financement touchant les films à moyen budget (Le Milieu n’est plus un pont mais une faille, édité en 2008).
Nous voudrions évoquer avec lui ses débuts (à l’Ina, à la fin des années 70), les différences et les similitudes de la production de documentaires et de fictions, son travail de longue date avec les frères Dardenne (pour qui il est “le troisième oeil”), son attachement à la notion d’indépendance. À ce propos, nous avons retrouvé ľ’une de ses interventions à l’occasion d’un débat public organisé par Périphérie :
“Tout passe par l’ordre des désirs. C’est à dire on commence par le désir d’un réalisateur, porteur d’un projet qui suscite le désir d’ un producteur, qui va susciter le désir d’un diffuseur. Et tous les courts-circuits ou toutes les inversions dans cette chaîne sont un frein à l’indépendance.”
Nous lui demanderons de revenir sur cette notion qu’il défend Tannée dernière, s’inscrit dans un collectif comme Les Films d’lci, farouchement. Si le travail de Richard Copans, que nous recevions Denis Freyd semble défendre cette indépendance de manière plus solitaire De cela aussi nous aimerions parler avec lui.
Filmographie Sélective :
Au sein des sociérés Archipel 33 et Archipel 35, Denis Freyd a notamment produit :
Documentaire :
- Dans un camion rouge de Patrice Chagnard, 2006
- L’Affaire Valérie de François Caillat, 2004
- L’Origine du christianisme de Gérard Mordillat et Jérôme Prieur, 2004
- Histoire d’un secret de Mariana Otero, 2003
- Le Convoi de Patrice Chagnard, 1999
- Corpus Christi de Gérard Mordillat et Jérôme Prieur, 1997
- Les Vivants et les Morts de Sarajevo de Radovan Tadic, 1993
- La Commission de la Vérité d’André Van In, 1993
- Marseille de père en fils (Coup de Mistral et Ombre sur la ville) de Jean-Louis Comolli, 1989
Fiction :
- Home d’Ursula Meier, 2008
- Le Silence de Lorna de Jean-Pierre et Luc Dardenne, 2008
- Bamako d’Abderrahmane Sissako, 2006
- Agua de Veronica Chen, 2006
- Nocturnes de Henry Colomer, 2006
- L’Enfant de Jean-Pierre et Luc Dardenne, 2005
- Le Tango des Rashevski de Sam Garbarski, 2003
- Le Fils de Jean-Pierre et Luc Dardenne, 2002
- Saint-Cyr de Patricia Mazuy, 2000
Extrait du catalogue du Festival, édition 2008
Filmographie sélective depuis 2008 :
- Le Monde et sa propriété de Gérard Mordillat, Christophe Clerc et Bertrand Rothé, 2022
- Ça marche !? de Camille de Casabianca, 2019
- Histoire d’un regard de Mariana Otero, 2019
- De chaque instant de Nicolas Philibert, 2018
- Jésus et l’Islam de Gérard Mordillat et Jérôme Prieur, 2015
- L’Apocalypse de Gérard Mordillat et Jérôme Prieur, 2008

2009 – Blanche Guichou, Agat Films – Ex Nihilo
Nous recevons cette année Blanche Guichou, productrice au sein d’AGAT Films & Cie/Ex Nihilo. Elle évoquera son parcours professionnel, ses choix et l’importance de la dimension collective de cette société de production. Elle nous parlera aussi de sa volonté d’interroger constamment sa pratique et de son désir de transmission, aspect que nous n’avions pas encore abordé lors des précédents parcours.
“ Après une formation littéraire, j’ai suivi le parcours classique des intermittents, qui m’a permis de faire la rencontre fondatrice d’Armand Gatti, d’assister à la naissance d’ARTE, de filmer l’éclosion de la danse contemporaine, d’être le bras droit de Denis Freyd lorsqu’il a créé Archipel 33.
En 1992, j’ai rejoint le collectif AGAT Films & Cie/Ex Nihilo. Après trois années passionnantes passées à structurer et à gérer les deux sociétés, je suis revenue avec beaucoup de bonheur vers la production
Produire au sein de ce collectif de huit producteurs associés est une aventure singulière. Chacun d’entre nous doit concilier au quotidien une pratique individuelle qui consiste à développer, accompagner puis produire et valoriser le travail d’ un auteur et une pratique collective fondée sur la solidarité financière, éditoriale et humaine entre les producteurs.
Et chacun doit inventer quotidiennement comment relever ce défi constamment renouvelé et y trouver son équilibre.
Si je me suis consacrée quasi exclusivement au documentaire pendant 12 ans, aujourd’hui je produis aussi des fictions. Mais dans les deux domaines, ie privilégie l’accompagnement des auteurs d’ un projet à l’autre, d’une forme à l’autre, d’un genre à l’autre.
Par ailleurs, je m’investis régulièrement dans des travaux d’intérêt général (formations, commissions, groupes de travail). Car dans un contexte qui rend difficile le renouvellement des formes et des talents, le partage et la confrontation me paraissent être les meilleures armes pour lutter contre l’isolement du producteur, et lui permettre de rester le premier allié des auteurs dans le travail incessant de création et de transmission des œuvres au public. »
Blanche Guichou
Filmographie sélective Blanche Guichou, Au sein d’ AGAT Films & Cie/Ex Nihilo
Dernières productions:
- Gamines d’Éléonore Faucher, sortie décembre 2009
- J’apprends la France d’Ariel Camacho, 2009
- Espèces d’espèces de Denis Van Waerebeke, 2008
- Journal d’un jeune fasciste de Paolo Santoni, 2008
Films de Chantal Richard:
- Au nom des trois couleurs de Chantal Richard, 2009
- Lili et le baobab de Chantal Richard, 2006
- Un jour, je repartira… de Chantal Richard, 2002
- Films de Lech Kowalski:
- East of Paradise de Lech Kovalski, 2004-2005
- On Hitler’s Highway de Lech Kovalski, 2002
Animation et documentaire:
- Quand les scientifiques content Florès de Laurent Orluc, 2010
- Alésia, le théâtre des opérations de Christian et Gilles Boustani, 2011
- Pinocchio, histoire d’un pantin de Folco Quilici, 2002
- Vagabondes du ciel de Mathias Ledoux, 1998
- Un drapeau pour quoi faire? d’Axel Clévenot et Patrick Cabouat, 1937
“ Rendre compte de notre époque “:
- Partir à tout(s) prix d’Ariel Camacho, 2007
- Nous, les Irakiens d’Abbas Fahdel, 2004
- J’ai deux mamans de Christine François, 2003
- Nous voulons un autre monde de Mariana Otéro, 2001 (collection “ Histoire d’ados “)
- La Loi des plus faibles d’Elisabeth Dubreuil, 2000
Courts métrages:
- Maîsama m’a dit d’Isabelle Thomas, 2006
- Un peu de Bedoin de Waldeck Weisz, 2000
- Week-end à Tokyo de Romain Slocombe et Pierre Tasso, 1999
Extrait du catalogue du Festival, édition 2009
Filmographie sélective depuis 2009 :
- Une aventure nommée Brésil de Kakie Roubaud, 2010
- Le secret de l’enfant fourmi de Christine François, 2011
- Ici on noie les Algériens : 17 Octobre 1961 de Yasmina Adi, 2011
- Les déferlantes d’Eléonore Faucher, 2013
- Atome Sweet Home de Vincent Gaullier, Raphaël Girardot et Benoit Giros, 2015
- Oman, le trésor de Mudhmar de Cédric Robion, 2018
- Kromdraaï – A la découverte du premier humain de Cédric Robion, 2021
- C’est pas parce qu’on est pauvre qu’on doit mal manger ! de Thierry Kübler, 2021

2011 – Alexandre Cornu, Les Films du Tambour de Soie
Co-fondateur en 1987 des Films du Tambour de Soie, société de production aujourd’hui basée à Marseille, Alexandre Cornu a produit notamment des films d’Alain Bergala, Robert Cahen, Jean-Louis Comolli, Jean-Paul Fargier, Denis Gheerbrant. Alexandre Cornu évoque donc l’évolution de ses pratiques de production, de ses premiers désirs de réalisation à son heureuse “carrière” de producteur. Il intervient aussi régulièrement comme tuteur à la fémis, Eurodoc, Les rencontres de Lavilledieu. Il est membre du Spi, du C7 et co-président de l’Association des Producteurs en Région PACA.
1- Un Mariage d’amour plutôt que de raison
Avignon, printemps 1937: nous venons de fonder notre société de production, au nom librement inspiré d’une œuvre théâtrale de Mishima (Le Tambour de Soie ou Aya no Tsusumi en version originale japonaise). L’Équipe est composée de 5 personnes, fondues de cinéma et de télévision, désireuses de posséder un outil de production adapté à la production de leurs futurs films.
Ce sont les années d’apprentissage, consacrées à la réalisation de courts métrages de fiction. La joyeuse bande gravite principalement autour de deux réalisateurs/fondateurs, Jacques Malaterre et Bernard George. J’ai 23 ans, et comme tous les jeunes gens férus de cinéma, élevés au Ciné-Club de Claude-Jean Philipe, nourris au Cinéma de Minuit de Patrick Brion, je veux être réalisateur…
Et j »ai emprunté 5000 francs à ma mère pour participer à la création de l’entreprise…
2- Tu sais taper à la machine ?
Les carrières se jouent souvent sur des coups de dé… Jacques Malaterre m’a posé la question, j’ai répondu par l’affirmative, me voilà proclamé “producteur”… Pendant que mes associés iront, eux, s’amuser sur le terrain, réaliseront des films, feront finalement ce que nous rêvons tous de faire, je resterai attaché à mon bureau en Avignon, obligé comme une âme en peine de rédiger des dossiers, contraint de passer des heures au téléphone pour la cause commune.. Producteur, quelle déception !
3 – Marseille, aujourd hui
2011. J’ai conservé la machine à écrire, une Olympia à ruban. Et j’ai pris goût au métier de producteur. Un métier formidable qui conjugue l’artistique et le financier. L’un et l’autre sont ontologiquement liés, ne doivent surtout pas être séparés. Mais j’ai appris au fil du temps que l’artistique primait. Le contenu guide la démarche, le financement l’accompagne ensuite pour la rendre possible.
Alexandre Cornu
Extrait du catalogue du Festival, édition 2011
Filmographie sélective depuis 2011 :
- Madame Tyson d’Edward Porembny, 2013
- Au diapason du monde de Catherine Catella, 2014
- Le Sous-bois des insensés de Martine Deyres, 2015
- Les Heures heureuses de Martin Deyres, 2019
- Jusqu’à la mer de Marco Gastine, 2019
- Jeunesse (in)visible – Malo & les Etincelles de Julie Siboni, 2020
- Quand les impressionnistes voulaient peindre les murs de Marie-Christine Courtès, 2021
- Interdit aux chiens et aux Italiens d’Alain Ughetto, 2022
- L’homme qui disparaissait de Joseph Beauregard, 2024

2012 – Jacques Bidou, JBA productions
Jacques Bidou est à la tête de JBA productions, société qu’il a créée en 1987 et avec laquelle il a produit plus de 100 films.
Parmi ces films, de nombreux longs métrages ont été sélectionnés à Cannes : Les Gens de la Rizière (Rithy Panh, 1994), Capitaines d’Avril (Maria De Medeiros, 2000), Lumumba (Raoul Peck, 2000), Une Part du ciel (Bénédicte Liénard, 2002), Salvador Allende (Patricio Guzman, 2004), Parmi les films documentaires figurent notamment: Chroniques Sud- Africaines (réal. collective, 1988), My Vote is my Secret ( Julia Henderson, Thulani Mokoena et Donn Rundle, 1995), Les Gens des baraques (Robert Bozzi, 1996), Carnets d’un combattant kurde (Stefano Savona, 2006).
Jacques Bidou est membre du conseil d’administration de La fémis, directeur des études de la formation EURODOC et depuis 2011 directeur des études du programme DOCMED.
Comment êtes-vous venu au cinéma ?
Je suis entré dans le cinéma par une porte qui s’appelle la passion des films, et par une école. Je suis très formation initiale, j’ai fait une école qui s’appelle |’INSAS. J’étais en réalisation et quand j’ai vu les films de Renoir ou d’autres grands maîtres, j’ai pensé qu’il valait mieux faire un médiocre producteur qu’un très mauvais réalisateur. Je suis donc devenu producteur, beaucoup plus tard d’ailleurs.
Qu’est-ce qui motive vos choix de production ?
J’ai commencé à produire en 1987, il y a vingt ans, et mes choix ont été d’aller vers des terrains où il y avait des urgences, véritablement des urgences, donc plutôt vers des pays en développement, plutôt des premiers films, et toujours des regards de l’intérieur, des cinéastes issus des pays qui m’intéressaient. J’ai d’abord produit beaucoup de documentaires parce que c’était très important pour moi de plonger dans toute une série de réalités, puis à partir de 1990-1992, j’ai commencé à produire de la fiction, en tout, cela fait une centaine de films, une trentaine de longs métrages de cinéma et le reste des films pour Arte ou des chaînes de ce type, Channel 4 ou des chaînes allemandes.
En vingt ans de production, comment avez-vous vu évoluer les choses?
La tendance lourde est toujours la même, c’est-à-dire la déréglementation de tous les systères fait qu’il y a aujourd’hui une course à l’audience, une compétition vers les très larges publics et une assez grande difficulté à faire vivre les œuvres singulières. Une évolution qui est donc pour nous préoccupante.
Entretien sur le site Internet dissidenz – 2007
Extrait du catalogue du Festival, édition 2012
Filmographie sélective depuis 2012 :
- Les Terrasses de Merzak Allouache, 2013
- Fils de Caïn de Marcell Gerö, 2014
- Eva ne dort pas de Pablo Agüero, 2015
- Jésus – Petit Criminel de Fernando Guzzoni, 2016
- Donbass de Sergei Loznitsa, 2018
- Yalda, la nuit du pardon de Massoud Bankhshi, 2019

2013 – Michel David, Zeugma Films
Né à la fin de la guerre, Michel David dit avoir tout appris en fréquentant les ciné-clubs au moment de la Nouvelle Vague. Il commence sa carrière par des fonctions administratives au sein du CNC (de 1977 à 1984), est directeur artistique de la Cinémathèque française en 1985 et 86, puis se lance dans la production de longs métrages. Il produit des documentaires depuis plus de quinze ans. Zeugma Films existe depuis 1996 et développe également, depuis 5 ans, une activité de distribution de documentaires en salles.
Quels sont les films produits par Zeugma Films ?
Des documentaires certes, mais ce mot est sujet à caution, puisque toute une production industrielle a été développée pour les besoins des diffuseurs. Nous voudrions offrir toujours de l’inattendu, de l’exceptionnel, de l’ambitieux.
Des films dont le spectateur sent que ça a été vital pour l’auteur-réalisateur de le mener à bien, que c’est une aventure où son âme même est mise en jeu. Des films qui laissent le spectateur libre de penser par lui-même, qui ne donnent pas de clefs ou plutôt qui offrent au regard plusieurs clefs, dont certaines cachées. Des films qui ne posent pas les questions que “ l’on “ attend, qui n’ont pas d’attitude de complaisance ou d’apitoiement, qui osent un regard froid, c’est-à-dire très chaud, pas neutre, très lucide, très amoureux. Ce ne sont pas les sujets qui déterminent notre politique de production puisque seule la manière de les traiter nous importe ; ce sont des rencontres uniques entre une matière, un auteur, une équipe et nous. Tant mieux – et heureusement ça arrive -si un diffuseur prend la balle au bond.
Avec le recul de quelques années, pouvons-nous en tirer un bilan ?
Plusieurs films traitant de la notion de passage de frontières (physique : une demande de passeport, temporelle : la recherche d’un mythe hollywoodien et de son propre passé). Plusieurs réalisateurs installés à Paris, mais ayant gardé une nationalité étrangère. Beaucoup de femmes et quelques hommes, des vrais. Des films où le son a toute sa place: les langues bien sûr, les bruits – les machines de la propreté dans un film presque muet – les voix – celles angoissées qui appellent au secours Sida Info Service, celles, pénétrantes, des inspecteurs des RG. – les musiques originales et le silence. Un humour ténu, rauque, douloureux parfois. Des films, des films uniques, assez peu d’ailleurs en nombre, puisqu’il faut nous et vous laisser le temps de les aimer.
Michel David
Michel David a notamment produit:
- Le Libraire de Belfast d’Alessandra Celesia, 2011
- Bruxelles-Kigali de Marie-France Collard, 2011
- Eclats de guerre d’Adrien Faucheux, 2011
- On est là de Luc Decaster, 2011
- Territoire perdu de Pierre-Yves Vandeweerd, 2011
- Le Bateau en carton de José Vieira, 2010
- Fleurs Noires de Baptiste Bessette, 2010
- In Purgatorio de Giovanni Cioni, 2009
- Le Cercle des noyés de Pierre-Yves Vandeweerd, 2007
- Luntano d’Alessandra Celesia, 2006
- Zuoz de Daniella Marxer, 2007
- Oliva Oliva de Peter Hoffman, 2005
Extrait du catalogue du Festival, édition 2013
Filmographie Sélective depuis 2013 :
- Hautes Terres de Marie-Pierre Brétas, 2014
- Qui a tué Ali Ziri ? de Luc Decaster, 2015
- Les héritiers de Maxence Voiseux, 2016
- Les miracles ont le goût du ciel d’Alessandra Ceresia, 2017

2014 – Sophie Salbot, Athénaïse
Après avoir, au sein de la société Les Films de la Plaine, assuré la production des films de Idrissa Ouédraogo, Samba Traoré (Ours d’argent – Berlin 1993), Le Cri du cœur (Sélection officielle – Venise 1994) et Kini & Adams (Sélection officielle – Cannes 1997), Sophie Salbot crée la société Athénaïse et y produit films de fiction et documentaires.
Elle intervient régulièrement dans le Master de Documentaire de Création de Grenoble – Lussas et dans des résidences d’écriture ou de production en Afrique organisées par Doc Monde.
Parmi les films produits, Une Fenêtre ouverte et Le Monologue de la muette de Khady Sylla, Tèt grenné de Christian Grandman, Rêves de poussière de Laurent Salgues, Les Enfants du blanc et Notre étrangère de Sarah Bouyain, Les Loups de Sophie Deraspe, La Lune est tombée de Gahité Fofana.
La vie, c’est la vie.
La semaine dernière, nous avons visionné les premiers rushes du prochain documentaire de Alice Diop. Alice, Amrita David sa monteuse et moi.
Quand elle est venue me voir en décembre dernier pour me proposer de la produire, je ne prévoyais pas de m’engager sur de nouveaux projets. Mais la lecture de son texte m’a saisie. Frontière, passage, c’est de ça dont me parle ce film. Il questionne ma capacité à reconnaître l’autre, à comprendre que c’est par mon regard qu’il peut exister, que c’est par le sien que j’existe. Il me renvoie à moi-même.
Comment percevoir dans des rushes la promesse d’un film à venir ? Je ne m’en sens pas toujours capable. Mais cette fois-ci, la pression, les enjeux étaient moins grands puisque nous ne sommes qu’au début du tournage. Ce visionnement était une étape dans le lent processus qui nous amènera au film. Il a confirmé que les intuitions de Alice étaient bonnes. Déjà, je crois reconnaître dans certains plans le cœur, la raison même de son film. Déjà, elle a su saisir le désarroi généré par l’impuissance, la dignité dans l’abandon, un silence insondable.
Je n’aime pas le mois de septembre, la rentrée. Ce recommencement obligatoire. Je m’apprêtais à produire le premier long métrage de Adama Sallé. Et puis cet été Adama est mort. Qui parle de vaincre ?, c’était le titre de son film. Il y travaillait depuis plusieurs années et je l’accompagnais. Ce film, jamais nous ne le verrons.
Extrait du catalogue du Festival, édition 2014
Filmographie sélective depuis 2014
- L’Homme-vertige de Malaury Eloi-Paisley, 2024
- Paroles de Nègres de Sylvaine Dampierre, 2021
- Nous d’Alice Diop, 2020
- La Permanence d’Alice Diop, 2016
- La Lune est tombée de Gahité Fofana, 2015

2015 – Céline Loiseau, TS Productions
Plus qu’à un parcours personnel de producteur, nous souhaitons convier une société qui produit documentaires et fictions, comprendre avec eux comment s’articulent les deux genres dans leur travail d’accompagnement des auteurs et des films.
TS Productions en est un bel exemple, et nous invitons Céline Loiseau et Miléna Poylo et à venir nous en parler.
La naissance de la production des documentaires chez TS productions est liée à l’activité de fiction. Dès 1999, Miléna Poylo et Gilles Sacuto développaient le premier long métrage de Jean-Marc Moutout Violence des échanges en milieu tempéré. Le film suit le parcours d’un jeune consultant dont la mission commence par l’étude du fonctionnement d’une usine, puis qui doit participer au renvoi d’un certain nombre de salariés.
Jean-Marc et son coscénariste Olivier Gorce ressentaient la nécessité de faire des recherches et avaient besoin de travailler sur des cas réels pour écrire le scénario. Miléna Poylo a eu l’idée de les envoyer aux chantiers navals du Havre qui étaient dans une situation difficile et où elle avait des contacts. Jean-Marc Moutout a finalement réalisé le documentaire Le dernier navire, qui suit la dernière année de vie de ce chantier, en 2000, après 500 ans d’existence. Le film a été coproduit et diffusé par Arte.
Cette expérience de synergie entre les documentaires et les longs métrages nous a incités à développer l’activité des documentaires, portée dans un premier temps par Valérianne Boué, puis par Céline Loiseau à partir de 2004, rejointe par Delphine Morel en 2009. Aujourd’hui nous avons produit 35 documentaires.
Nous plaçons l’accompagnement de nos auteurs au cœur de notre travail pour qu’ils affirment leur univers et leur style au mieux de film en film.
TS Productions a notamment produit les documentaires :
- Avant de partir de Marie de Laubier, 2000
- Le Dernier navire de Jean-Marc Moutout, 2000
- René Vautier, cinéaste franc-tireur de Sabrina Malek et Arnaud Soulier, 2002
- Heureux qui communiste de Daniel Cling, 2005
- Dans les jardins de mon père de Valérie Minetto, 2006
- Chacun sa Palestine de Nadine Naous et Léna Rouxel, 2007
- Fils de Lip de Thomas Faverjon, 2007
- Retour aux sources de Bernard Blancan, 2011
- Narmada de Manon Ott et Grégory Cohen, 2012
- Chaumière d’Emmanuel Marre, 2013
- City of Dreams de Steve Faigenbaum, 2014
- L’Homme aux serpents d’Eric Flandin, 2014
- Home Sweet Home de Nadine Naous, 2014
Extrait du catalogue du Festival, édition 2015
Filmographie sélective depuis 2015 :
- Mes fantômes arméniens de Tamara Stepanyan, 2025
- Beshar de Nadège Abadie, 2024
- Green Line de Sylvie Ballyot, 2024
- Château Rouge de Hélène Milano, 2024
- La Machine à écrire et autre sources de tracas de Nicolas Philibert, 2024
- Averroès et Rosa Parks de Nicolas Philibert, 2023
- Sur l’Adamant de Nicolas Philibert, 2023
- Bibliothèque publique de Clément Abbey, 2021
- Manigances de Bernard Blancan, 2019
- De cendres et de braises de Manon Ott, 2018
- Les Petits Maîtres du grand hôtel de Jacques Deschamps, 2017

2016 – Félicie Roblin, Zadig Productions
Félicie Roblin raconte comment le cinéma est présent dès l’enfance dans sa vie mais en filigrane et sur le mode émotionnel. C’est sa mère qui étudie à l’IDHEC (devenue la FEMIS), travaille pour la télévision scolaire de Niamey et crée le département de Cinéma à l’Institut
National des Arts d’Abidjan. Ce sont les souvenirs très forts des premiers films vus en plein air, en Afrique où elle vit avec sa mère, puis dans les années 70, alors que le retour en France est difficile à vivre, l’échappatoire salutaire qu’offrent les salles de la Cinémathèque et des nombreux cinémas d’art et d’essai de Paris. Elle y découvre avec délice westerns et films noirs américains.
Après le baccalauréat, s’inscrire en faculté de cinéma semble une évidence, sans objectif professionnel précis. D’ailleurs d’objectif professionnel qui se soit formulé explicitement, Félicie Roblin se souvient seulement de « Tout sauf professeur », idée que de la longue lignée familiale d’instituteurs, il est temps de sortir, enfin.
Après l’université, toujours pas de projet clair mais pas producteur en tout cas, qu’elle explique aussi simplement par l’image caricaturale du métier dûe aux lectures de biographies hollywoodiennes : gros cigare, voiture luxueuse, ton cassant et supérieur, pas de quoi inspirer une jeune cinéphile.
Le hasard des rencontres lui permet de travailler comme assistante de réalisation sur des téléfilms de fiction, puis comme assistante de production.
Elle va alors participer à une aventure télévisuelle au succès foudroyant : l’émission « Perdu de vue ». Elle y est coordinatrice éditoriale et assistante des producteur et rédacteur en chef. Elle narre avec enthousiasme la découverte du direct, mais surtout, et cela est beaucoup plus surprenant, l’attachement à la dramaturgie. Celle de l’émission est soigneusement pensée, inscrite dans le conducteur. C’est elle qui en est responsable. Quand l’émission s’arrête, Félicie Roblin envisage, pour la première fois, devenir productrice car ce que fait Bernard Bouthier, le producteur de l’émission, l’intéresse vraiment.
Elle débute ce métier à Morgane productions et l’exerce aujourd’hui à Zadig productions. Elle souligne la nécessité d’être nourrie (intellectuellement, sensiblement) par des rencontres et des sujets car ce métier est dur, de travailler dans une ambiance de confiance mutuelle, d’envies communes, et insiste sur l’importance de la fidélité aux auteurs avec lesquels elle partage beaucoup. C’est ce qu’elle évoque, à partir d’extraits, dans son parcours de productrice. Notamment avec les films : Ma Céline à moi de Stephan Moszkowicz, Parle avec moi de Didier Cros, Partir Revenir de Juliette Warlop, Il est minuit Paris s’éveille d’Yves Jeuland…
Extrait du catalogue du Festival, édition 2016
Filmographie sélective depuis 2016 :
- Années 80 – Les brunes ne comptent plus pour des prunes ! de Lucie Cariès, 2024
- Gene Kelly mène la danse de Claudia Collao, 2024
- Houssegor, histoires d’utopistes de Guillaume Estivie, 2023
- Le Compromis : dans les coulisses du pouvoir de Fanny Tondre, 2023
- L’Abattoir idéal, une histoire d’éleveurs de Gertrude Baillot, 2023
- Ma part d’héritage de Lorène Debaisieux, 2022
- Mendès la France d’Yves Jeuland et Alix Maurine, 2022
- No Sex de Didier Cros, 2022
- Romy, femme libre de Lucie Cariès, 2022
- Montand est à nous d’Yves Jeuland, 2021
- John Huston, une âme libre de Marie Brunet-Debaines, 2021
- La SNCF sous l’Occupation de Catherine Bernstein, 2019
- Des Russes blancs d’Yves Riou, 2018
- Fred Astaire, l’homme aux pieds d’or d’Yves Riou et Philippe Pouchain, 2018
- Audrey Hepburn, le choix de l’élégance d’Emmanuelle Franc, 2017

2017 – Yaël Fogiel, Les films du poisson
Yaël Fogiel est née en Israël en 1965. Après l’obtention d’un Master en Langues et Civilisation Orientales, elle débute sa carrière dans le cinéma comme directrice de production et de vente pour la société de production française Lapsus.
En 1994 elle fonde avec Laetitia Gonzalez « Les Films du Poisson », société de production et de distribution. Le premier film qu’elle produit, Madame Jacques sur la Croisette, écrit et réalisé par Emmanuel Finkiel, gagne le César du meilleur court-métrage en 1997.
Depuis, elle continue d’enrichir sa carrière de productrice autour d’une ligne éditoriale exigeante, ouverte sur le monde et reconnue en France et à l’international. « Les Films du Poisson » ont produit à ce jour plus d’une centaine de longs-métrages, documentaires et courts-métrages pour le cinéma et la télévision primés en France et à l’étranger. À leur actif, cinq César dont celui du meilleur premier film pour Voyages d’Emmanuel Finkiel et pour Depuis qu’Otar est parti de Julie Bertuccelli, plusieurs sélections et prix à Cannes – Meilleure mise en scène (Tournée de Mathieu Amalric), film de clôture de la Sélection Officielle (L’Arbre de J. Bertuccelli), Caméra d’Or (Les méduses d’Etgar Keret et Shira Geffen) ainsi qu’une nomination aux Oscars (The Gatekeepers de Dror Moreh).
Son travail de productrice et celui de sa partenaire, a reçu de nombreuses récompenses parmi lesquelles le Prix Hachette du Meilleur jeune producteur 1996, César du Meilleur Producteur 2011 (Prix Toscan du Plantier), les Trophées Personnalité de l’année 2011, Duo TV 2014 par le Film Français, ou encore le Prix IFCIC 2008.
En 2017 « Les Films du Poisson » produisent la fresque historique d’Emmanuel Finkiel La Douleur (avec Mélanie Thierry, Benjamin Biolay et Benoît Magimel), le documentaire pour le cinéma d’Éric Caravaca Carré 35, le prochain long métrage de fiction de Julie Bertuccelli. Le dernier vide grenier de Claire Darling, ainsi que The Room de Christian Volckman (avec Olga Kurylenko et Justin Chatwin).
Tout en continuant de soutenir des réalisateurs de renom avec lesquels s’entretient une fidèle collaboration, tels que Mathieu Amalric, Julie Bertuccelli, Dror Moreh ou Emmanuel Finkiel, « Les Films du Poisson » poursuit son travail de découvreur de talents.
Extrait du catalogue du Festival, édition 2017
Filmographie sélective depuis 2017 :
- Carré 35, d’Eric Caravaca, coproduction NiKo Film, 2017
- Charlotte Salomon, la jeune fille et la vie, de Muriel Coulin, 2022
- Et j’aime à la fureur d’André Bonzel, coproduction Les Artistes Asociaux Productions, 2022
- Orlando, ma biographie politique, de Paul B. Preciado, 2023
Fiction :
- Serre moi fort de Mathieu Amalric, 2021
- En thérapie d’Oliver Nakache et Eric Toledano, 2021
- Little Girl Blue, docu-fiction de Mona Achache, 2023
