Charles Chézeau

Né le 17 janvier 1905 à Paris (XVIème arr.) mort le 21 août 1955 à Paris (Xème arr.), peintre décorateur, militant syndicaliste et communiste, secrétaire adjoint (1936-1939), puis secrétaire général des travailleurs de l’industrie du film (CGT), secrétaire général de la Fédération du Spectacle (1951-1955), résistant.

Originaires de la Creuse, les parents de Charles Chézeau, tailleur de pierre et couturière, s’installèrent comme boutiquiers à Paris au début du XXème siècle. Élevé dans le quartier de Belleville, Charles Chézeau fit son service militaire en Algérie, parmi les zouaves. Après avoir vraisemblablement exercé la profession de coloriste sur pellicule, il devint peintre décorateur aux studios de Billancourt, à une époque où aucune convention ne protégeait le travail des ouvriers du film. Aux côtés de Robert Jarville, il participera à la création, en 1934, du Syndicat général des travailleurs de l’industrie du film (SGTIF) qui s’affilia à la Fédération des industries chimiques dirigée, à partir de 1936, par l’ex-unitaire Édouard Finck. En tant que secrétaire adjoint du syndicat, Charles Chézeau participa activement à la direction des grèves des studios et des laboratoires de cinéma de la région parisienne, en juin 1936. Ces grèves furent couronnées de succès et assurèrent au Syndicat général des travailleurs de l’industrie du film, une place prédominante dans la profession et une certaine aura au sein des organisations du Front populaire. Comme en témoignent plusieurs articles du Travailleur du film, organe du SGTIF, et une lettre postérieure de Jean Renoir, Charles Chézeau suivit également, pour le compte de son syndicat, le tournage de La Marseillaise (1938), le film de Jean Renoir soutenu par la CGT.

Après avoir participé à l’organisation de la solidarité vis-à-vis de l’Espagne Républicaine, il se rendit, en 1937, en mission dans ce pays, vraisemblablement avec une délégation du comité central du PCF chargée des questions d’organisation. Charles Chézeau résidait alors à Belleville, rue Jouye-Rouve. De retour d’Espagne, Charles Chézeau reprit son métier de peintre et ses activités syndicales au sein du Syndicat Général des Travailleurs du Film qui avait intégré en 1938, non sans difficulté, la Fédération du Spectacle. Mobilisé en 1939 dans une unité combattante, Charles Chézeau, après l’armistice, entra dans la clandestinité puis, en province, dans la Résistance où il obtint le grade d’officier FFI. Sous le pseudonyme de « lieutenant Patrik », il s’occupa essentiellement de missions de renseignements, en particulier à l’aéroport d’Avord (proche de Bourges) où il se fit un moment embaucher comme peintre. Revenu à Paris à la Libération, il participa à l’insurrection au sein de la capitale, vraisemblablement aux côtés (ou sous les ordres) d’André Tollet et d’Albert Ouzalias. Il lui fut alors proposé une carrière militaire, mais Charles Chézeau préféra reprendre ses activités syndicales. Élu à la tête du Syndicat général des Travailleurs de l’Industrie du Film en 1945, il devint, la même année, secrétaire de la branche cinéma de la Fédération Nationale du Spectacle (CGT) puis, en 1951, secrétaire général de la fédération. Charles Chézeau était par ailleurs membre de la section cinéma du PCF, créée en novembre 1947 et rattachée au comité central, au moment où le Parti Communiste entendait se saisir de la question des industries nationales (aviation, cinéma) pour combattre l’aide et les visées américaines. Le dirigeant cégétiste manifesta toujours une fidélité sans faille à son parti.

Dans les années d’après-guerre, Chézeau fut particulièrement actif dans la lutte contre les accords Blum-Byrnes et pour la défense du cinéma français. Militant et travailleur infatigable, son autorité et sa compétence étaient reconnues dans la plupart des milieux du cinéma, au-delà même des cercles syndicaux. Plusieurs hommes et femmes du spectacle (Simone Signoret, Jean Cocteau, André Berthomieu, Louis Daquin, Jean Grémillon) lui manifestèrent leur soutien. En tant que dirigeant de la Fédération du Spectacle, Charles Chézeau siégeait au sein du conseil d’administration du Festival International du film (Festival de Cannes) et au sein de différents organismes du Centre National de la Cinématographie (CNC). Il fut par ailleurs l’un des principaux organisateurs de la manifestation du 4 janvier 1948 pour la défense du cinéma français et fut également à l’initiative de la création des Comités de défense du cinéma français. Avec Jacques Marion, secrétaire général de la Fédération nationale du Spectacle, socialiste et franc-maçon, Charles Chézeau sut maintenir l’unité globale de la fédération lors de la scission avec Force Ouvrière et atténuer les dissensions au sein du Syndicat national des artistes (SNA). Durant cette période, la fédération nationale du Spectacle semblait au faîte de son pouvoir. Elle était en effet solidement implantée au sein des studios de cinéma, des laboratoires et parmi les acteurs, même si elle dut se résigner à une attitude « défensive », ses rêves de cogestion de l’industrie cinématographique nationale s’étant rapidement évanouis peu de temps après la Libération.

Gravement malade, Charles Chézeau dut officiellement abandonner ses activités syndicales en décembre 1954, mais il continua à suivre de près toute la vie de la Fédération. Il décéda le 21 août 1955, à Paris, à l’âge de cinquante ans. Le cercueil du dirigeant syndical fut exposé au siège de la CGT, rue Lafayette, où une garde d’honneur fut observée par Benoît Frachon, Alain Le Léap, des dirigeants de la Fédération du Spectacle, des représentants du comité central du PCF, du comité de la paix du spectacle et par ses anciens camarades du studio de Billancourt. Au cimetière de Pantin, les hommages furent prononcés par Henri Back, (le nouveau secrétaire général du Syndicat général des travailleurs du film), par le député communiste Fernand Grenier, Henri Reynaud et par Claude Autant-Lara, président de la Fédération nationale du spectacle. En mai 1956, Charles Chézeau fut élu président d’honneur de cette fédération.

Décoré de la Croix de guerre 1940, Charles Chézeau était également titulaire de la médaille de la Résistance. Il était père de deux enfants issus de deux unions différentes (Gisèle Chézeau, née en 1930, décédée en 1980, et Patrick Rayer, né en 1950).

Tangui Perron

(in Claude Pennetier (dir.), Le Maitron – Dictionnaire Biographique, Mouvement ouvrier Mouvement social, tome 3, de 1940 à mai 1968, Les Editions de l’Atelier, 2007, pp. 314-315)

SOURCES :

Arch. Comité national du PCF, comité central, 4 novembre 1947.

Fonds de la Fédération nationale du spectacle, Arch. Départementales de la Seine-Saint-Denis (65 J 310).

Fonds Chézeau de l’Institut CGT d’histoire sociale, Arch. Départementales de la Seine-Saint-Denis.

Entretiens avec Patrick Rayer-Chézeau et Louis Adelin (hiver 2000-2001).

Charles Chézeau © IHS